samedi 30 janvier 2016

Shitlickers - Cracked Cop Skulls

1982 > Hardcore/Crust/D-beat/Shot calibré


Z'avez bien 5 minutes à me consacrer, non, juste avant d'aller bouffer ou entre 2 disques intellos ou intéréssants ? Le temps de s'envoyer un EP d'ultraviolence sadique et je m'en foutiste dans la tête. Le titre, Cracked Cop Skulls dans une de ses appellations officielles d'origine incontrôlée, annonce nettement la couleur. Les Shitlickers, Suédois dans le texte, ont fait partie de toute cette meute D-Beat/crust(y le Clown) énervée qui a émergé dans le pays de Zlatan au cours des années 80, très fortement influencés par Discharge (d'où le genre emprunte d'ailleurs son nom), certains allant même jusqu'à singer leur nom, en le choisissant préfixé par la syllabe Dis. 4 titres à fond la caisse, dont un potentiel tube de l'été avec Spräckta Snutskallar repris plus tard par Ratos de Porão, des riffs qui seraient presque énormes si on pouvait les extraire du magma en fusion les engloutissant, une voix étouffée pas trop écorchée qui s'y débat crachant des bribes de textes punks dans leur contenu succinct. 4 mots pour Warsystem (dont 3 fois "Warsystem"), une question ("Who tell the cunts to do what they do ?") et une réponse sans appel fournie dans le titre pour The Leader (Of The Fuckin' Assholes). Même pas de kiffer que c'est déjà fini. D'ailleurs, en parlant de kiff, vous saviez que l'orgasme le plus long chez une fille était de 45 secondes ? 4 titres de 50 secondes chacun, fais le compte. Pendant que tu lisais cette kro mal fichue et que tu t'envoyais ce Cracked Cop Skulls en même temps, elle a eu le temps de prendre son pied 4 fois. Heureux veinard.

dimanche 24 janvier 2016

David Bowie - Blackstar

 2016 > Experimental rock/Jazz/Testament

Le contrecoup est plutôt rude. Et le réveil assez difficile. C'est un peu surnaturel pour dire vrai. On y croit pas vraiment, on se demande si ça n'était pas tout bonnement un simple cauchemar, certains de nos rêves nous semblant tellement réels qu'on est véritablement tenté d'y croire jusqu'au moment où la réalité nous rattrape brutalement, prenant la forme d'une fille inaccessible te faisant un doigt tout en te rappelant, le sourire moqueur en coin, que tu vas être en retard à ton boulot minable. La réalité... La réalité est implacable. Et ça a quelque chose de flippant. Et de dégueulasse.
Pourtant, on connait les règles du jeu dès le départ - ou si peu -, on se dit qu'il y aura toujours un moyen de tricher ou d'éviter les cases "Labyrinthe" ou "Puits" pour arriver en case 63. Mais la réalité se tient là, c'est le juge qui veille au respect du règlement, c'est la laisse passée à notre cou et qui nous étrangle, peu à peu nous étouffe, prend tout ce qu'il y a à prendre avant de se tailler et de ne laisser derrière elle qu'une coquille vide. Peut-être bien que cette réalité-là n'est rien d'autre que cette chienne de vie après tout.
"Et surtout une bonne et heureuse nouvelle année !" Et mon cul ? J'estime - et à juste titre, j'en suis sûr que vous en conviendrez - qu'il y a eu tromperie sur la marchandise. Car personnellement, je n'avais pas signé - si tenté que j'avais signé pour quelque chose - pour un début d'année aussi pourri. Car si certains secteurs sont en difficulté, la petite entreprise de la faucheuse, elle, ne connaît pas la crise en ce début d'année 2016 avec un regain d'activité important surtout auprès des artistes. Ca avait commencé avec Lemmy "The Mötorhead Soul" Kilmister qui n'avait même pas entraperçu 2016, puis tour à tour ce furent Michel Delpech, Michel Galabru, Pierre Boulez et Yves Vincent qui nous quittèrent - d'autres se sont malheureusement ajoutés à la liste depuis l'instant où j'ai écrit ces lignes - jusqu'à ce lundi 11 Janvier 2016 où ce fut au tour de David Bowie de prendre congé. L'émotion fut grande. Car certes, ce n'était pas un membre de la famille - du moins pas la mienne, ni la vôtre, je suppose - mais depuis 45 ans, on s'était habitués à sa présence, à son disque annuel, à ses concerts, ses apparitions cinématographiques de-ci de-là. Il faisait un peu partie des meubles, comme l'horloge du salon ou le chien familial, distillant sa formidable musique comme un orfèvre à travers tes enceintes ou ton casque. Un tel monument en somme, qu'on envisageait pas une seconde sa mort, pour citer un de mes potes. Et quand celle-ci survient, cela fait un choc et surtout nous laisse un grand vide. Heureusement dans notre malheur, il a eu le temps de nous laisser un ultime témoignage de son immense talent de caméléon et de touche-à-tout musical: Blackstar sorti le jour de son 69ème anniversaire. 
Avec cet album, son 26°, Bowie avait promis le retour à une musique plus avant-gardiste et expérimentale, plus jazzy également, dans la veine de ce qu'il avait pu proposer à la fin des années 70 au cours de sa période dite Berlinoise notamment avec l'extraordinaire "Heroes" et sa face B presque entièrement synthétique et instrumentale co-réalisée avec Brian Eno, continuant à établir les codes de ce qu'on appelerait la musique ambient, codes déjà partiellement jetés par Eno en solitaire après son départ de Roxy Music. Le premier single extrait de l'album, à savoir l'éponyme Blackstar, accréditait totalement cette thèse. Des beats electro/technoïdes, un retour remarqué du saxophone, un rythme plutôt lent pour un titre construit en 2 parties, la première aux 2 extrémités du morceau suffocante et malsaine, la seconde au coeur du morceau, plus aérienne avec l'irruption de sons et nappes plus synthétiques, légers et atmosphériques, le refrain faisant le pont entre les 2 parties en étant à la fois entêtant et déformé. Du haut de ses 10 minutes, avec son clip et ses lyrics pour le moins dérangeants - voir Bowie, un bandeau autour de la tête et des boutons en guise d'yeux entonner le vers "On the day of execution" - Blackstar est en effet un singulier premier single et une curieuse entrée en matière. La suite nous réserve bien d'autres surprises: 'Tis A Pity She Was A Whore - quel intitulé ! - et son feeling très jazz cabaret, l'electrojazzdisco I Can't Give Everything Away dresse un émouvant bilan de fin de vie, Sue dévoile une facette noise rock de Bowie que je ne lui connaissais pas, facette qui trouve son prolongement sur le phénoménal single testament du maître, Lazarus, définitivement le moment de grâce de l'album, le dernier chef d'oeuvre de Bowie, la dernière preuve si on en doutait que le bonhomme n'avait jamais perdu sa capacité à pondre d'immenses titres. Car oui, Lazarus - du nom du personnage de la Bible Lazare de Béthanie qui aurait été ramené à la vie par Jésus alors qu'il était mort et enterré depuis 4 jours -, coincé dans ce duel fratricide que se livrent sans merci ce saxophone et ces guitares cisaillantes à travers desquelles on jurerait reconnaître Steve Albini, est un véritable crève-coeur. Car l'acteur qui se cache sous les traits fatigués de Lazare, ce n'est autre que David Bowie lui-même. Il n'y a qu'à jeter un oeil aux lyrics, limpides, pour s'en convaincre. "Look at me, man, I'm in heaven" incroyable et prémonitoire permier vers, "I've got scars that can't be seen" témoin de ses excès passés et qui faillirent lui être fatals au coeur des années 70, "Everybody knows me now" traite de son statut à présent établi de rock-star mondialement connue, "Look at me, man, I'm in danger" puis quelques lignes plus loin "You know, I'll be free" prennent un autre éclairage maintenant qu'on sait que l'Anglais souffrait d'un cancer et se trouvait ainsi dans une situation pour le moins précaire. En outre, l'utilisation de la première personne et la mention de New York - une ville où Bowie vivait depuis 20 ans - ne peuvent plus faire croire à une simple coïncidence. Bowie, qui a incarné et manipulé tant de personnages comme des marionnettes au cours de sa carrière a ici livré son ultime rôle et fait tomber le masque en même temps: Lazare n'est rien qu'un autre prête-nom pour Robert David Jones, le petit Londonien devenu géant aux pieds d'argile, qui a été mis à mort comme l'avait déjà été avant lui Ziggy Stardust. Un tel caméléon ne pouvait que s'offrir une sortie théâtrale comme celle-ci. "Ain't that just like me ?" demande-t-il dans un dernier vers avant un merveilleux solo final de saxophone. Oh que si, David, oh que si... Ca te ressemble tout à fait.