dimanche 28 février 2016

Buffalo Springfield - Again

1967 > Folk/Rock/Blues


Le pouvoir de la marque c'est fabuleux quand même. L'autre fois, je traînais dans un magasin de jouets et je matais la différence de prix entre les Lego standard et les Lego Star Wars. Je veux bien croire que Chewbacca soit difficile à modeler en figurine mais tout de même. Près de 20 euros de différence entre 2 boîtes, de même surface, de même contenant ou presque (comprenez: des briques) tout cela pour 2 mots inscrits sur le carton. Et vous noterez que c'est la même chose dans énormément de domaines. Alors faisons les parfaits moutons et suivons la logique et la meute ! "Ces chaussures sont en cuir véritable et super confortables". Mais je vais pas marcher plus vite avec, non ? Et puis les semelles ne sont pas inépuisables, je vais bien devoir les balancer ou les filer à mon chat pour qu'il joue avec au bout d'un moment, non ? "Ces biscuits sont faits à partir de blé d'origine contrôlée". En gros, ils sont comestibles, juste un peu plus que les autres. "Ce vin, c'est un grand crû de 20 ans d'âge". Ouais, il saoûle juste de manière plus agréable que la Villageoise ou le Vieux Pape mais même effet, au bout du compte. "Ces fringues, c'est des [Insérez la marque de votre choix] !" Ah, ça veut dire qu'elles n'ont pas besoin d'être lavées, que ce blouson est 2 fois plus chaud et que ce pull en laine véritable ne gratte pas. Et je ne vous parle même pas du PQ... Et bien les étiquettes en musique, c'est un peu la même chose. Je vous balance un nom de groupe bien gentillet, limite anonyme plus le nom d'une star qui y a figuré bien que de manière éphémère, et hop le tour est joué, même pas besoin d'écouter, c'est le chef d'oeuvre assuré et éternel. Exemple: Buffalo Springfield, qui compta dans ses rangs Neil Young et Stephen Stills et leur 2° album Again. Un album tout ce qu'il y a de plus classique entre folk, blues, rock et psychédélique (nous sommes tout de même en 1967) que Rolling Stone classe 188° album de tous les temps. Je veux bien croire que ce disque est parfait mais dans ce cas-là ce serait qu'il est parfaitement neutre: les compos de Young tiennent la route, mieux que sur son premier effort solo d'ailleurs, et sont disposées pour 2 d'entre elles - à savoir Mr. Soul et Broken Arrow - sur les extrémités ce qui est assez bien vu, le discret Sad Memory et Everyways sont assez bonnes. Et puis c'est tout. Parfaitement désuet et inoffensif. Une égérie aux lentilles colorées et aux seins siliconnés. Maldonne. Duperie. Une erreur sur la personne. PS: dans ton testament, demande à être enterré avec tes Adidas et ton polo Ralph Lauren, tu pourras peut-être monnayer ta place en enfer.                 

samedi 27 février 2016

Bruit Noir

2015 > I / III

Noir comme la colère, noir comme la mélancolie. A moins qu'il ne s'agisse de peurs recluses au plus profond de nous mêmes ou bien de l'intimité exposée au grand jour. Un cri d'alarme est lancé à travers la noirceur du quotidien. C'est l'épuisement d'une volonté qui rêve sans cesse de se dérober à son destin inflexible. Un regard vers le passé réveille des sentiments consumés par le temps. La douceur d'une œuvre laisse alors place à l'amertume, voire à l'agacement. Que faut-il encore espérer ? Un bruit couvert par la nébuleuse médiatique se propage à travers les foules gavées par la propagande. On ne lui reconnaît aucun accoutrement, mais le message est très parlant. On ne saurait dire si ces mots sont prononcés ou bien chantés. Ils ne peuvent, en tout cas, rester tapis dans l'ombre, portés par une voix grave qui n'a nul besoin de forcer pour se faire imposer. Le bruit comme pour désigner un style qui n'appartient à aucun registre facilement identifiable. La mécanique s'opère rapidement, avant même de comprendre la recette. D'ailleurs, une fois touché, on ne cherche plus à la comprendre. On reconnaîtra volontiers que cette atmosphère brumeuse a quelque chose d'hypnotique. Des paroles simples qui retranscrivent des pensées tantôt personnelles tantôt communes. Répétées inlassablement, elles gagnent notre approbation. Martelées sur un rythme fougueux comme des incantations, elles font germer l'envie de prendre part au mouvement. La formule sonne avec une simplicité déstabilisante et pourtant, l'ambiance grisonnante aux quelques couleurs pastelles sait faire force. La voix de Pascal Bouaziz y est manifestement pour beaucoup dans cet album qui mêle le genre biographique avec d'autres thèmes du quotidien et de la société. Les sons mystiques dressent des décors envoutants, voire intriguants. Bruit Noir est une curiosité musicale dont il faut profiter.

dimanche 21 février 2016

Dire Straits - Dire Straits

1978 > Blues/Rock à l'ancienne


Il y a 38 ans débutait l'intéressante aventure studio des Dire Straits avec le début de l'enregistrement de leur premier album éponyme. 1978, donc, une époque pour le moins trouble où l'on découvrit de nouvelles façons de faire de la musique autrement que via le talent pur et la virtuosité. A l'énergie, aux tripes, les jeunes punks voulaient tuer le père (voir le refrain de 1977 des Clash, "No Elvis, Beatles, or The Rolling Stones") et leur héritage. C'est peut-être pour une de ces raisons que j'éprouve un si grand respect et même admiration pour les Dire Straits et leur oeuvre. Car sortir un tel premier album de blues/rock roots en pleine tempête punk anglaise, fallait non seulement le faire mais également avoir les couilles de le faire. Dire Straits l'album, c'est du rock pur et dur composé par un groupe imperméable à ce qui se passait autour de lui et sûr de son jeu: une basse, une batterie, 2 guitares dont un guitar hero en la personne d'un journaliste de 27 ans prénommé Mark Knopfler qui se charge également de la composition et de tenir le micro. Un premier album ni mauvais, ni totalement excellent, ce qui sera une constante dans leur discographie mais extrêmement plaisant. Pour Sultans Of Swing et son solo évidemment, un titre à présent passé à la postérité mais pas seulement. Southbound Again, mais également le monumental Down To The Waterline illuminent un album qui s'est vu confier à son insu et sans y être programmé à la base la lourde tâche de donner un nouveau sens à l'expression "faire du rock". Et qui s'en est acquitté avec brio. 

Mgła - Mdłości

2006 > Black metal/Immense et intense poutre


Le ciel est noir. Anthracite. Comme du charbon. Le jour ne tombe pas. Il gît déjà sur le sol, désarticulé, comme une marionnette qui aurait perdu ses ficelles et son maître et qui demanderait pardon. Pardon pour tout. Pardon pour rien. Pardon de n'avoir rien fait et d'avoir tout laissé faire. Le jour ne s'est jamais levé aujourd'hui. Encore trop marqué par la beuverie d'hier soir. Encore trop déchiré. Panne de ré-veille. Sale tronche dans le miroir. Smash the mirror. Yeux rougis, langue pâteuse, esto-maqué avec la flotte. Même son de cloche. Même les nuages sont noirs. Comme si un mec avait renversé son encrier et que tout s'était répandu dans l'air, dans l'eau, dans la terre, empoisonnant chaque parcelle de matière. Les corbeaux volent bas. Pratiquement au niveau du sol. Les animaux fuient la lande. Ventre à terre. La tête aussi, comme écrasée par un indicible poids inextricable. La respiration sourde, le coeur prêt à bondir hors de la poitrine. Hétéroclites. Renards, sangliers, loups, piafs, pêle-mêle disparaissent dans l'obscurité comme traqués par une menace invisible. Le clairon sonne l'hallali tandis que les lilas fanent. Pris au piège. Intoxiqués. Se désintègrent en laissant une pitoyable trace comme preuve de présence ou un administratif acte de naissance. Un déni d'existence. Il y a d'autres cadavres ici. La nuit règne. Le jour gît et l'heure hache les minutes en fines lamelles. La nuit reine. Le sang noir ou l'indécision de savoir si tes yeux sont ouverts ou non. Clignants bien que défaillants. Des montagnes hallucinantes. Putride. Fétide. Des memebres inertes. Des visages déformés qui n'ont plus grand chose d'humain. Pestilentiel. Il y a un mec avec une pelle ou un râteau qui se tient là. A moins que ce ne soit une femme. Il titube. Dieu s'est absenté pour un moment. Veuillez rendre l'âme après le bip. La lettre griffée en Polonais ça se prononce "we". Dans cette même langue, "mdłości" ça veut dire "nausée". Et sur ces 10 minutes noires et apocalyptiques, il ne s'agit que de cela.   

Sadistik - The Balancing Act

2008 > Abstract hip hop/Dark hip hop


Voilà bien du hip hop comme je l'aime. Fait avec les tripes, pour des tripes. Découvert grâce à quelqu'un que vous connaissez bien - cela dit vous pourriez mieux le connaître s'il faisait un peu plus de chroniques et moins son timide, n'est-ce pas Cham's ? - et à qui j'avais dit le week-end dernier que je kiffais pas mal Mobb Deep et ses mélodies déprimantes. Dans Sadistik, il y a "Sad". Mais ça aurait pu tout aussi bien s'appeler "Melancholik" que ça aurait été pareil. Triste donc, oui, mélancolique à souhait. La pochette de toute façon, superbe de noirceur, annonçait la couleur. Cody Foster de son vrai nom, originaire de Seattle, livre avec The Balancing Act un premier album aussi mature que soigné et ce, à seulement 22 ans. Une ambiance singulière, presque morbide parfois, pour une bande-son qui illustre parfaitement ce qu'est une humeur post-bad trip. Armé de son flow rageur qui rappelle parfois furieusement Eminem et de sa plume incisive, Sadistik se chargera de vous laminer l'esprit avec son hip hop sombre et vénéneux à coups de mélodies imparables qui font mal à la tête. Playing God, Searching For Some Beautiful, Absolution, Angel Eyes sont autant de petits bijoux funeral et malsains à l'instrumentation variée et accrocheuse (piano, guitare - ce riff sur Absolution, bon sang... -, violons et même accordéon !) qui se chargent de casser l'ambiance avec une facilité déconcertante. Une excellente surprise en matière de hip hop underground et une discographie à creuser plus en détail.